Des feux ravagent les abords de la capitale grecque depuis lundi. Vingt-six personnes sont notamment mortes piégées dans la cour d’une taverne, à 30 m de la plage.
« C’est un moment difficile pour l’Attique, c’est une nuit très dure pour la Grèce », a déclaré le premier ministre grec, Alexis Tsipras, dans la nuit de lundi 23 à mardi 24 juillet, alors que les incendies faisaient rage sur plusieurs fronts en Grèce, notamment en Attique, vers Corinthe et en Crète. Rentré précipitamment d’un déplacement en Bosnie, Alexis Tsipras a découvert une « situation hors de contrôle » et une « image sans commune mesure ».
Mardi 24 juillet au matin, la Grèce ravagée par les incendies s’éveillait sous le choc : au moins 74 personnes ont péri et 170 ont été blessées, selon un nouveau bilan des pompiers à la mi-journée. La plupart des victimes ont été piégées dans leur maison ou leur voiture près de la ville balnéaire de Mati et de Rafina, à une quarantaine de kilomètres au nord-est d’Athènes. Mardi matin, 26 corps carbonisés étaient encore retrouvés dans la cour à côté d’une taverne à Mati, à 30 m de la plage. « Ils essayaient de fuir vers la mer, ils n’ont pas eu le temps de se réfugier sur la plage… Je n’oublierai jamais la vue de ces corps morts », a confié, ému, à la télévision grecque, le président de la Croix-Rouge, Nikos Oikonomopoulos, présent sur les lieux de l’incendie.
Les images tragiques s’accumulaient dans les médias grecs mardi : quatre corps avaient été repêchés par les autorités portuaires dans la mer. Trois femmes et un enfant se sont noyés. Beaucoup voulant s’enfuir par la mer ont dû faire face à des vagues immenses, et 700 personnes ont préféré rester sur les plages de l’Attique en attendant d’être conduites vers le port de Rafina, pour être mises en lieu sûr.
La police portuaire mobilisait mardi matin plusieurs bateaux pour les transférer ; une équipe médicale était également à bord d’un navire de la police portuaire pour assurer les premiers secours. Sur le réseau social Twitter, toute personne possédant une embarcation était appelée à prêter main-forte. Par solidarité, plusieurs habitants de la zone ont essayé d’évacuer avec des caïques (bateaux) les personnes bloquées. Des taxis se rendaient aussi volontairement près de Rafina pour évacuer gratuitement les familles vers Athènes.
Les voitures brûlées sur la route reliant Rafina et Athènes ont été abandonnées, les conducteurs s’enfuyant, paniqués, vers la mer. Vangelis Bournous, le maire de la ville balnéaire de Rafina, a assuré mardi matin que « plus de 1 000 maisons ont été détruites, et 300 véhicules brûlés. Beaucoup de nos concitoyens vont rester sans logement et il faudra aussi trouver une solution pour eux ».
M. Oikonomopoulos craint un bilan très lourd : « Toutes les maisons et les véhicules n’ont pas été fouillés, les pompiers et les secours risquent de découvrir d’autres horreurs. » Vers Kineta, deuxième front important de feux, la situation était aussi critique, puisque l’autoroute entre Athènes et Corinthe avait été fermée lundi soir, et le train arrêté pendant plusieurs heures. En Crète, près de La Canée, un autre incendie ne menaçant pas d’habitations était en passe d’être maîtrisé mardi matin. Sur les réseaux sociaux, plusieurs proches de personnes se trouvant dans les zones concernées par les incendies publiaient des photos des leurs et demandaient des nouvelles avec le hashtag #pirkagia (« incendie »).
« Nous devons garder notre calme pour sauver le bien le plus important : la vie humaine », a rappelé le premier ministre grec, demandant aux habitants des zones concernées de ne pas prendre de risque pour sauver leurs biens matériels. « Quinze départs de feu simultanés sur trois fronts différents en Attique » ont été déclenchés lundi en soirée, selon le porte-parole du gouvernement grec, Dimitris Tzanakopoulos. Des vents violents soufflant jusqu’à plus de 100 km/h, une mer déchaînée avec 9 Beaufort, et des températures caniculaires de 40 °C ont rendu la tâche encore plus compliquée pour les secours. Sept Canadair, dix hélicoptères et plus de 300 camions de pompiers étaient mobilisés depuis lundi soir.
La Grèce a activé dès lundi soir le mécanisme européen de protection civile pour obtenir des renforts venant d’autres Etats membres : deux Canadair d’Espagne et 60 pompiers de Chypre devaient être envoyés mardi matin en Grèce. En raison du nombre important de départs de feux simultanés, Athènes a demandé aussi des drones aux Etats-Unis « pour observer et détecter toute activité suspecte ». Les feux d’origine criminelle, en vue de spéculation immobilière, sont assez fréquents en Grèce. En 2007, les derniers feux les plus dévastateurs avaient fait 77 morts dans le Péloponnèse et sur l’île d’Evia. Le gouvernement conservateur avait alors été décrié pour son manque d’efficacité dans la gestion de cette situation d’urgence. Le leader de l’opposition, Kyriakos Mitsotakis (Nouvelle Démocratie, droite), s’est contenté de déclarer mardi que « l’heure était au deuil, à l’unité et à la solidarité ».
SWource : Le Monde