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«Incontestablement nocive»: la surprenante charge de l’OMS contre la cigarette électronique

Dans un rapport sur les ravages du tabagisme publié fin juillet, l’Organisation mondiale de la Santé étrille la cigarette électronique. Une position à contre-pied de celle adoptée par de nombreuses instances sanitaires.
Deux pages dans un rapport qui en compte plus de 200. C’est la maigre part que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a consacrée à la cigarette électronique dans son dernier rapport sur la lutte contre le tabagisme dans le monde, rendu public le 26 juillet. C’est pourtant les conclusions à son égard qui ont fait la une des médias. Contre toute attente, l’agence onusienne a en effet considéré que la cigarette électronique est «incontestablement nocive» et qu’elle «ne devrait pas être promue comme une aide au sevrage». Une condamnation ferme, à rebours des positions adoptées par de nombreuses instances sanitaires. Sans compter que ces dispositifs ont déjà aidé des milliers de personnes à arrêter de fumer: au moins 700.000 en France ces 7 dernières années, selon Santé publique France.

Réactions indignées

L’affirmation n’a pas manqué de faire réagir associations d’usagers, tabacologues et professionnels de la vape. «Incompréhensible position de l’OMS. Le tabac est responsable de 73.000 morts en France. L’e-cigarette permet d’arrêter de fumer. Ses composants sont à l’évidence moins nocifs que le tabac», a ainsi rappelé l’Académie nationale de Pharmacie sur Twitter.

Interrogé sur RMC le 29 juillet, le Pr Gérard Dubois, membre de l’Académie nationale de médecine, a pour sa part dénoncé une «erreur de communication invraisemblable». «La cigarette électronique est destinée aux fumeurs car ils sont en danger, le tabac tue 8 millions de personnes chaque année», a-t-il martelé. «Si vous voulez comparer les deux en termes de dangerosité, c’est comparer le pistolet à bouchon avec un canon de marine».

De son côté, l’association Sovape, qui réunit acteurs et scientifiques du secteur, a été jusqu’à qualifier le rapport de l’OMS de «désinformation». Quant au Pr Bertrand Dautzenberg, grand défenseur de la cigarette électronique, il s’inquiète que ce message n’aggrave «la méfiance des fumeurs envers l’e-cigarette» et n’ait un «effet délétère sur les tentatives d’arrêt.»

Des effets bien moindres que ceux de la cigarette

La position de l’OMS prête à confusion. Alors que l’agence reconnaît que «les effets à long terme des inhalateurs électroniques de nicotine restent inconnus», elle n’hésite pas à affirmer que la cigarette électronique est «incontestablement nocive». Elle met notamment en garde sur le risque potentiel d’irritation des voies respiratoires, de la gorge et des yeux, ou encore le risque d’effets cardiovasculaires.

Certes, remplir ses poumons des dizaines voire des centaines de fois par jour de substances chimiques vaporisées n’est assurément pas anodin pour la santé. Nul n’affirme le contraire. Mais toutes les études qui ont comparé les effets de la cigarette électronique à celle du tabac sont unanimes: les risques du vapotage sont incomparables à ceux du tabagisme. Ce que l’OMS confirme dans son rapport. Selon l’Académie des sciences américaines, la substitution complète de la cigarette par l’e-cigarette réduit l’exposition de l’utilisateur à un grand nombre de substances toxiques et cancérogènes. Des études – dont certaines ont fait beaucoup de bruit – ont mis en évidence des effets délétères, mais il faut préciser que leur méthode ne permet pas de conclure avec certitude.

«Il n’y a aucun doute scientifique sur le fait que les émissions d’e-cigarette, sans être dénuées d’effets indésirables, sont infiniment moins nocives pour la santé que la fumée du tabac», avait confié au Figaro le Pr Bertrand Dautzenberg, pneumologue, au mois de juin. L’agence britannique de Santé publique – qui promeut la cigarette électronique comme outil d’aide au sevrage tabagique – a même estimé qu’elle est 95% moins dangereuse que le tabac.

Un outil de réduction des risques

Bien qu’elle admette que la cigarette électronique puisse aider certaines personnes à arrêter de fumer, l’OMS déconseille son utilisation dans ce cadre, arguant que son efficacité en la matière est encore «débattue». Plusieurs études publiées ces dernières années indiquent pourtant le contraire. L’une d’elles, publiée en mai 2019, a même montré que la cigarette électronique serait deux fois plus efficace que les substituts nicotiniques classiques pour arrêter de fumer.

Certes, la cigarette électronique n’est pas inoffensive. Mais face à l’urgence de l’«épidémie mondiale de tabagisme», pourquoi décourager les fumeurs d’utiliser une alternative bien moins dangereuse que le tabac, pour laquelle aucun effet délétère à court ou long terme n’a encore été démontré? Faut-il rappeler que plus de la moitié des fumeurs trouvent la mort à cause du tabac?

Prudente, l’OMS s’inquiète également du fait que la cigarette électronique ne devienne une porte d’entrée vers le tabagisme. «La nicotine est addictive et l’usage de la cigarette électronique pourrait conduire les gens, en particulier les plus jeunes, à consommer du tabac sous des formes plus nocives», écrit-elle, pointant du doigt les pratiques marketing bien rodées des entreprises pour séduire les jeunes. Mais en pratique, cette hypothèse n’a pas été confirmée par des faits scientifiques.

En revanche, cela soulève une autre question: l’utilisation prolongée de la cigarette électronique ne risque-t-elle pas de renforcer l’addiction à la nicotine des fumeurs et ex-fumeurs? Le doute est permis. D’autant qu’une étude britannique récente a montré qu’une large part de vapoteurs continuent d’utiliser leur e-cigarette un an après l’arrêt du tabac. Mais, toujours dans un objectif de réduction des risques, mieux vaut vapoter que de fumer du tabac, produit dont on sait qu’il tue quasiment à tous les coups.

Source : Le Figaro

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