Les autorités chinoises et japonaises ont rapporté que plusieurs personnes guéries de l’infection CoVid-19 ont pourtant été testées positives une deuxième fois au nouveau coronavirus baptisé Sars-CoV-2. Les chercheurs s’interrogent sur la réponse immunitaire à cette infection.
Peut-on retomber malade quand on a déjà contracté le CoVid-19 ? Ou est-ce quasi impossible comme avec la varicelle ? C’est la question que se posent les chercheurs du monde entier, après qu’une patiente japonaise et plusieurs patients chinois ont été testés positifs une deuxième fois à l’infection par le Sars-CoV-2 alors qu’ils étaient considérés guéris.
Dans le cas de la Japonaise, elle avait été testée positive au nouveau coronavirus en janvier dernier. Elle a été prise en charge à l’hôpital avant de pouvoir rentrer chez elle. Mais quelques semaines plus tard, elle souffrait de nouveau de maux de gorges et de douleurs thoraciques et a donc été réadmise à l’hôpital. Les patients chinois, eux, étaient asymptomatiques lorsqu’ils ont été testés une deuxième fois positifs lors d’examens de suivi.
Immunité ou réinfection possible ?
Selon certains chercheurs, il ne s’agirait pas d’une réinfection, mais plutôt de traces de virus pas complètement éliminé. Interviewé par le New York Times, Florian Krammer, virologiste à l’Icahn School of Medicine at Mount Sinai à New York, explique : “Je ne dis pas que la réinfection est impossible mais dans ce court laps de temps, c’est peu probable. Même les formes d’infection les plus légères doivent laisser au moins une immunité à court terme contre le virus chez le patient en convalescence“.
Une vision partagée par Anne-Marie Moulin, chercheuse au laboratoire SPHERE du CNRS, qui explique que “cela ne prouve pas que les anticorps protègeront d’une deuxième attaque mais suggère qu’ils jouent un rôle dans l’évolution favorable de l’infection“.
D’autres scientifiques évoquent enfin la possibilité d’une infection biphasique : un virus qui persisterait sous forme latente dans l’organisme et qui pourrait devenir plus symptomatique quand les poumons sont atteints.
Une récente étude chinoise publiée dans The Lancet a par ailleurs montré que la durée moyenne de l’excrétion virale, définie comme l’expulsion des particules virales du corps, était de 20 jours chez des survivants de l’infection à CoVid-19. Chez les 54 personnes décédées étudiées, le virus était détectable du début de la maladie jusqu’à leur mort.
Immunité : les spécialistes font part de leurs doutes
Le président du Conseil scientifique, le professeur Jean-François Delfraissy, a déclaré au cours d’une audition mercredi 15 avril au Sénat que la science n’était pas en mesure de savoir si une personne contaminée par le Covid-19 était vraiment immunisée. “On se demande si une personne positive à la maladie Covid-19 sera ensuite protégée [contre le coronavirus]. Finalement, nous ne savons pas si les anticorps produits forment une protection” a-t-il expliqué. “Ce virus est très particulier. Nous avons remarqué que la durée de vie des anticorps protegeant contre le Covid-19 était très courte. Et nous constatons également de plus en plus de cas de récidive chez des personnes ayant déjà eu une première infection” affirme Jean-François Delfraissy. “Si Jean-François Delfraissy lui-même [… ] fait part de l’incertitude qui est celle de toute la communauté scientifique mondiale [… ] vous imaginez-bien que le ministre des Solidarités et de la Santé ne pourra pas vous apporter des réponses plus claires” a annoncé Olivier Véran le 15 avril, en précisant qu’il faudra du temps pour déterminer si les patients présenteront une mémoire immunitaire.
Des tests diagnostiques peu fiables ?
De son côté, le virologiste Jin Dong-yan, interviewé par South China Morning Post, n’exclut pas la possibilité d’une erreur diagnostique. “Ce n’est pas une deuxième infection ou une infection persistante, comme certains pourraient penser. C’est soit parce que les patients expérimentaient une longue évolution de la maladie, soit parce que les tests diagnostiques n’étaient pas faits correctement“.
Le test diagnostique du nouveau coronavirus consiste en un prélèvement microbiologique dans les voies respiratoires hautes et basses (nez et bronches). Ce prélèvement est ensuite envoyé pour analyse dans un laboratoire. En Chine, les patients sont considérés comme guéris lorsque deux autres tests diagnostiques sont réalisés et que les résultats sont négatifs. Mais les échantillons prélevés peuvent être stockés à une température qui détériore le virus. Ou encore, la zone prélevée peut ne pas être touchée par le virus qui se trouve ailleurs dans le corps, ce qui fausse là aussi le test.
“Un test est considéré positif si le virus se trouve sur l’écouvillon en quantité suffisante au moment où le prélèvement est réalisé, précise en effet l’épidémiologiste Marc Lipsitch. Un test négatif ne signifie pas forcément que le virus n’est plus présent“. Interviewé par Doctissimo, Olivier Schwartz, directeur de l’Unité Virus et immunité de l’institut Pasteur, ajoute : “Le plus probable est que la charge virale avait baissé jusqu’à être sous le seuil de détection du test, puis a remonté ensuite“.
Porteurs asymptomatiques : un risque de contagion faible
Si la question de la fiabilité des tests diagnostiques se pose, les chercheurs souhaitent également savoir si ces patients testés positifs une deuxième fois au Sars-CoV-2 mais asymptomatiques ont la capacité de contaminer d’autres personnes.
Une hypothèse peu probable selon le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) Tedros Adhanom Ghebreyesus qui a déclaré le 3 mars 2020 : “Avec la grippe, les personnes infectées mais asymptomatiques sont des moteurs de transmission importants, ce qui ne semble pas être le cas avec le CoVid-19. Des données chinoises montrent que seulement 1 % des cas rapportés sont asymptomatiques, et la plupart des cas développent des symptômes dans les deux jours suivant l’infection“.
Peu de choses sont finalement connues sur le Sars-CoV-2, et le mystère reste donc entier autour de l’immunisation à ce nouveau coronavirus.
Source : Doctissimo.fr.